Monsieur le Commandant : Romain Slocombe

Publié le 24 Janvier 2012

 Y a quelqu'un qui m'a dit de lire :

 

 Monsieur le Commandant : Romain Slocombe

 

 Monsieur le commandantL'amour et la guerre font rarement bon ménage. Surtout quand un homme de Lettres, académicien, tombe éperdument amoureux d'une jeune allemande, sa belle-fille. Paul-Jean Husson est un fervent patriote, raciste envers les juifs. Il écrit des articles incitants à la haine raciale. Il prône le retour de Pétain au pouvoir, adhère corps et âme à la vision politique et ethnique d'Hitler.

 Olivier Husson, son fils, rencontre une comédienne allemande dont il tombe éperdument amoureux. Ils se marient, rendent visite à ses parents régulièrement. Le père d'Olivier est transi d'amour pour sa belle-fille, Ilse, mais cet amour est impossible. Ilse met au monde une petite fille dont le faciès est atypique. Paul-Jean Husson continue à vivre son amour secret. Il perd sa fille suite à un accident de bateau, puis sa femme atteint d'une tumeur au cerveau. Durant les périodes de démence de sa femme, il comprend que sa petite-fille est une demie-juive. Il envoie des détectives sur la traces des parents de Ilse afin d'en avoir le coeur net. La confirmation est faite : Paul-Jean Husson est amoureux fou d'une femme juive.

 Durant la guerre, il va s'efforcer de la protéger contre le nazisme, quitte à enfreindre les règles qui s'est imposées. Olivier est envoyé au front. Ilse,Paul-Jean et Hermione vivent ensemble. L'académicien continue à écrire contre les juifs avec une violence abjecte. Par ce biais, il se persuade qu'il protège l'être aimé.

 Durant la période de Vichy, Olivier rejoint sa femme à Paris. Il veut rejoindre De Gaulle en Angleterre. Il laisse de nouveau sa femme enceinte, sa fille aux mains de la gestapo. Durant cette période, Paul-Jean Husson franchit le pas et passe une nuit d'amour avec sa belle-fille. Elle attend un enfant de son beau-père. Pour régler le problème, cet auteur à succès dénonce la passion de sa vie aux autorités allemandes. Ilse sera envoyée dans un camp de concentration.

 

 Ce roman est une lettre que Paul-Jean Husson envoie au Commandant, lui expliquant les raisons de son geste. Ce n'est pas un roman épistolaire puisqu'il ne contient qu'une seule lettre de dénonciation. Ce texte est à la fois une peinture des évènements de l'Histoire entre 1935 et 1946, la violence infligée aux  juifs et une passion amoureuse destructrice. Le lecteur entre dans une tragédie grecque sous fond de seconde guerre mondiale. L'exode de familles entières, les bombardements, les conditions de vie du peuple français et les trahisons sont passés au crible.Les épisodes historiques s'entrelacent avec la passion amoureuse unilatérale d'un homme pour sa belle-fille.

 La passion amoureuse est vouée à l'échec car porteuse en son sein de tous les interdits : judaïsme, inceste....

 Romain Slocombe démontre le pouvoir des mots sur les hommes. Les articles, instigateurs de haine, sont écrits par des gens d'esprit. La lettre est parsemée de textes littéraires publiés dans beaucoup de journaux de propagande.

 Ce genre de délation était courante à cette époque. Romain Slocombe manie avec respect les faits historiques, il ne minimise pas les conséquences de ces lettres. Il démontre que chaque homme se donnait le droit de vie ou de mort sur des êtres humains au nom d'un idéal. Il ne se permet pas de donner une leçon de morale, ni de condamner les actes perpétrés à cette époque trouble.

 Bonne lecture historique et littéraire.

 

 Voici quelques citations tirées du roman :

" J'essaye de me remémorer les sentiments confus des premiers jours. Comme Olivier l'avait été, puis Jeanne, j'étais très certainement séduit. Cette jeune Allemande avait - a toujours, mais plus encore en ce temps-là - une façon bien à elle de vous mettre immédiatement à l'aise, une volubilité chaleureuse, un enthousiasme désarmant, et une candeur que venait tempérer sa finesse, sa sensibilité si remarquables."

" Le spectacle atroce de la défaite était partout. Les bas-côtés de la route débordaient de véhicules délaissés, carrosseries défoncées, vitres étoilées, ferrailles désossées dont on avait récupéré les roues, les moteurs, tout ce qui pouvait servir. Certaines autos gardaient la trace de mitraillages par l'aviation allemande, petits trous oblongs à travers le toit, et leurs sièges et banquettes portaient de larges flaques brunes de sang séché."

" J'étais suffisamment damné, et puni, pour ce que j'avais commis jusqu'à ce jour. Par les coups cruels qu'il me portait régulièrement, Notre Seigneur m'avait montré, comme le doigt sur la muraille, l'étendue et l'abomination de mes fautes."


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Rédigé par toujoursalapage

Publié dans #Y a quelqu'un qui m'a dit...

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M
bien entendu. Je pense faire une razzia chez mon libraire en février... une sacrée liste encore...<br /> bises
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M
franchement l'un des meilleurs livres de la rentrée... je pense que je vais me laissée tentée par son dernier : Shanghai Connexion: L'Océan de la Stérilité 3
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T
<br /> <br /> Je suis de ton avis, il fait partie de mes coups de coeur littéraire.<br /> <br /> <br /> Tu me feras part de ton avis sur son dernier roman.<br /> <br /> <br /> <br />
M
C'est possible ...
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M
Je suis étonnée que Romain Slocombe ait changé d'univers avec cet ouvrage. D'habitude, il est toujours question du Japon.
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T
<br /> <br /> Peut-être désire-t-il donner un nouveau souffle à ses écrits ?<br /> <br /> <br /> <br />