L'amour égorgé : Patrice Trigano
Publié le 7 Octobre 2020
Le Surréalisme, un sacré mouvement, qui a ébranlé les consciences défilant avec l'arrogance de sa jeunesse et de ses auteurs engagés les vestiges de la création.
Prenons le bras de René Crevel pour arpenter les subtilités de cet art créatif ! Entrons dans les débats animés, les vindicatives et luttons auprès de ces auteurs enragés et férus de modernité.
L'entrée en matière se fait violente par l'image de René découvrant le corps pendu de son père que sa mère acariâtre invective encore. Crevel côtoie les plus grands de ce mouvement en marche : Cocteau, Eluard, Dali, Giacometti... Il participe aux réunions sous haute tension, Breton au commande.
Patrice Trigano peint au vitriol une époque de bouleversements, le fascisme est aux portes de l'Allemagne, le communiste pénètre les cercles d'intellectuels. L'Art doit se nourrir d'un autre imaginaire, piochant dans des nouvelles techniques de création. La drogue et le sexe s'entrechoquent pour anéantir le passé. Dans ce désir de liberté artistique et surtout littéraire, les témoins du passé demeurent les arbitres d'un match révolutionnaire.
A lire pour comprendre de l'intérieur les défis, les désillusions , les victoires et les échecs d'un mouvement artistique incommensurable !
L'émotion de René était grande face à l'homme d'âge mûr qui avait pour lui une valeur de symbole : le guide d'une jeunesse qui souhaite tourner le dos à un monde qui ne lui convient pas, le maître à penser d'une génération montante en quête de liberté. Une des phrases lui revenait : "Brûlons nos livres inutiles, détruisons nos souvenirs, brisons les attaches du passé." Il mourait d'envie de lui dire que si la vie avait commencé le jour où il a découvert Rimbaud et Lautréamont, celle-ci n'avait pris tout son sens qu'avec la lecture des Nourritures terrestres:...
Dominant la vallée, le sanatorium de Davos était une sorte de paquebot des neiges dont la proue était la grande terrasse s'ouvrant sur un paysage immaculé. Tout y était blanc, les couloirs, les murs des chambres, les blouses du personnel, les lits métalliques, les draps, la céramique des cabinets de toilette...Les nuits blanches, elles aussi. Blanc, la couleur de l'oubli, de l'absence, de l'abîme.
- Mon cher, L'Âge d'or est une invitation aux abîmes de l'horreur. Seule la subversion est à même de déranger les habitudes léthargiques qui nous conduisent au pire. Qui peut prétendre connaître les hommes sans avoir été confronté à la méchanceté, à la perversité qui demeurent comme un dépôt en suspension dans les tréfonds de la psyché humaine? Pourquoi vouloir nier que le mal est en l'homme et qu'il le fascine?